< Retour Ă  la liste des articles 15 octobre 2012

Milcobel prĂȘte l’oreille aux voix du futur

VĂ©ronique Chagnon

« La coopĂ©rative ne vous appartient pas, vous ne l’hĂ©ritez pas de vos parents, vous l’empruntez Ă  vos enfants. Â» C’est Ă©crit en lettres noires sur la premiĂšre page du rapport annuel, comme un leitmotiv qui oriente toutes les actions de la coopĂ©rative. La maxime conclut le mot de Guido Veys, prĂ©sident de Milcobel, une coopĂ©rative de producteurs laitiers belge.

Une coopĂ©rative, mais pas n’importe laquelle : un gĂ©ant dont l’équivalent quĂ©bĂ©cois serait Agropur. Un million de litres de lait produits en 2010, le distributeur du tiers du lait sur le territoire belge et un chiffre d’affaires annuel de prĂšs de 825 millions de dollars.

MalgrĂ© tout, Milcobel se prĂ©pare Ă  relever tout un dĂ©fi. En 2015, les quotas qui rĂ©gulent la quantitĂ© de lait offerte sur le marchĂ© europĂ©en tomberont et, avec eux, le contrĂŽle des prix. Pour faire face Ă  la musique et trouver des moyens crĂ©atifs d’aborder cette nouvelle Ăšre, la coopĂ©rative a choisi de miser sur ses jeunes.

« Depuis la naissance de Milcobel, en 2005, Ă  la suite d’une fusion entre deux coopĂ©ratives existantes, l’intĂ©gration des jeunes a toujours Ă©tĂ© une prioritĂ© », raconte Eddy Leloup, directeur des affaires coopĂ©ratives. Mais pour prĂ©parer l’aprĂšs-quota, leur apport est primordial. « Ce sont nos plus jeunes membres qui continueront de produire longtemps aprĂšs 2015, donc il faut tenir compte de leurs idĂ©es. »

« En Belgique, la plupart des besoins fondamentaux sont aujourd’hui satisfaits, et crĂ©er une coopĂ©rative relĂšve le plus souvent d’un choix philosophique que d’une nĂ©cessitĂ©. La culture entrepreneuriale est peu dĂ©veloppĂ©e, celle de l’entrepreneuriat collectif encore moins…

Dans ce contexte […], les entreprises coopĂ©ratives ont un rĂŽle essentiel Ă  jouer pour promouvoir le modĂšle auprĂšs de l’opinion publique et Ă©duquer leurs coopĂ©rateurs, travailleurs et instances. PrĂ©sentations aux nouveaux coopĂ©rateurs ou sessions complĂštes de formation aux administrateurs, sĂ©ances d’information aux travailleurs ou campagnes de promotion auprĂšs du grand public, parrainage des nouveaux collaborateurs […] ne sont que quelques solutions pouvant ĂȘtre mises en place pour permettre Ă  toutes les parties de comprendre le fonctionnement et les enjeux d’une sociĂ©tĂ© coopĂ©rative, et les amener Ă  y prendre une part active et responsable. »

– Jean-Pierre PollĂ©nus, directeur de Febecoop, Belgique

Pour stimuler leur intĂ©rĂȘt, la coopĂ©rative de producteurs recrute les jeunes membres afin qu’ils siĂšgent Ă  divers comitĂ©s. La coopĂ©rative est mĂȘme allĂ©e jusqu’à l’inscrire dans ses rĂšglements : le conseil de la coopĂ©rative – un organe chargĂ© de dĂ©battre des orientations Ă  prendre par le conseil d’administration – doit ĂȘtre composĂ© d’au moins 25 % de jeunes. Et Milcobel organise frĂ©quemment des rencontres oĂč le micro leur appartient.

C’est d’ailleurs lĂ  que Ludovic Mestdagh, 29 ans, a fait ses premiers pas au sein de la coopĂ©rative. Les dirigeants avaient organisĂ© une rĂ©union destinĂ©e Ă  prendre le pouls des jeunes sur la question de l’aprĂšs-quota. Ludovic a sautĂ© sur l’occasion. « C’était l’occasion de dire comment je voyais la production laitiĂšre aprĂšs 2015 », se souvient Ludovic, qui est associĂ© avec ses parents dans la ferme familiale.

C’était en fĂ©vrier 2010. Aujourd’hui, il fait partie du comitĂ© francophone de Milcobel. « J’avais bien aimĂ© la rĂ©union, donc quand ils m’ont demandĂ© de faire partie du comitĂ©, j’ai acceptĂ© », se rappelle le jeune fermier. Il trouve l’expĂ©rience enrichissante. « Ça me permet de mieux comprendre comment ça fonctionne au sein de la coopĂ©rative, en plus d’exposer ma vision des choses », se rĂ©jouit celui qui est convaincu que le modĂšle coopĂ©ratif apporte la meilleure garantie aux fermiers dans un contexte europĂ©en.

Ludovic aura bientĂŽt droit Ă  une journĂ©e de formation sur la distinction coopĂ©rative, dans le cadre de celles que Milcobel tient chaque annĂ©e pour outiller ses jeunes membres et leur rappeler les rouages coopĂ©ratifs. « Ça nous permet de repĂ©rer dĂšs le dĂ©part ceux qui ont le plus de potentiel, ceux qui pourraient un jour faire partie du conseil d’administration, explique Eddy Leloup. Nous voyons cela comme un investissement pour l’avenir. »

« Les jeunes ont une vision et une attitude plus dynamiques. C’est en se basant sur leurs visĂ©es qu’on peut Ă©laborer la stratĂ©gie la plus pratique », ajoute-t-il. Eddy Leloup souligne que les consultations auprĂšs des jeunes ont pointĂ© vers des amĂ©liorations de la stratĂ©gie de marque et de la communication avec les membres.

Humble, Ludovic ne croit pas que les jeunes aient plus ou moins de dynamisme que les vĂ©tĂ©rans de Milcobel. « C’est surtout un moyen de dire aux gens qui Ă©taient dans les cercles de la coopĂ©rative : “Il y a une autre gĂ©nĂ©ration derriĂšre vous qui a des objectifs Ă  atteindre.” C’est un moyen de leur dire de penser Ă  nous », estime-t-il.

Quoi qu’il en soit, la mĂ©thode de Milcobel porte ses fruits. Ludovic songe Ă  siĂ©ger un jour au conseil d’administration. « Pour le moment, je me consacre Ă  prĂ©parer l’avenir de ma ferme, mais plus tard, je me dis : Pourquoi pas? »

www.milcobel.be

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