Dans les balbutiements de la coopération au XIXe siècle, il y avait la volonté de concilier des impératifs sociaux avec la vie économique. Cet idéal s’est cependant buté assez rapidement aux exigences « du terrain ». Une des conséquences pratiques les plus notables a été d’emmener les coopératives à se spécialiser dans un secteur, à délaisser des idéaux communautaires pour plutôt développer une efficience économique. Entendons-nous, cela n’enlève rien à ses dimensions collectives : propriété de l’entreprise par l’association des membres, pouvoir égalitaire, partage des ristournes basée sur l’usage plutôt que la détention de capital.
Dans les années 1960, dans une Italie déjà sur le chemin de la désinstitutionnalisation, quelques individus vont avoir l’intuition de renouer avec l’idéal initial et ainsi expérimenter un modèle de coopérative conciliant puissamment social et économique. Sous le nom de coopérative sociale, ces organisations peuvent compter plusieurs catégories de membres –des membres travailleurs, mais aussi des membres bénévoles, des membres consommateurs et offrent leur prestation à des populations vulnérables.
Ces organisations se développent rapidement, mais il faudra attendre près de 25 ans avant qu’une loi ne vienne préciser ce qu’elles sont et s’applique donc spécifiquement à elles. Ainsi, la loi 381 adoptée en 1991 définit deux grands types de coopératives sociales :
- Type A : elles offrent des services sociaux, sanitaires ou éducatifs dans des secteurs d’activité tournés vers les besoins de la communauté ou des personnes. Elles sont composées de travailleurs réguliers et permanentés.
- Type B : elles ont pour finalité d’insérer des personnes défavorisées sur le marché du travail et proposent un stage favorisant l’insertion à l’emploi ou des emplois protégés à des travailleurs défavorisés ou en situation de vulnérabilité à cause de plusieurs facteurs liés à des problèmes physico-sensoriels ou sociaux. Elles sont composées de travailleurs réguliers et de travailleurs en insertion dont le ratio peut varier, mais comme minimum au moins 30 % de la main-d’œuvre.
Il existe aussi des coopératives où l’on retrouve une combinaison de ces deux vocations (type A et B réuni dans une seule organisation). L’État italien soutient le développement des coopératives sociales de type B par des allégements fiscaux sur la masse salariale des travailleurs en insertion.
Sur le plan associatif, ces coopératives peuvent donc compter diverses catégories de membres, un peu comme les coopératives de solidarité au Québec. Cependant l’Italie reconnaît la catégorie de membre bénévole. On le devine, ces organisations sont à même d’hybrider des ressources. En effet, la coopérative sociale peut bénéficier de soutien des pouvoirs publics, tire des revenus par la vente de services ou produits et de plus, peut souvent profiter de contributions de bénévoles.
Selon des données de 2015, les coopératives sociales comptent plus de 7 millions d’usagers, leur chiffre d’affaires annuel est estimé à 7 milliards d’euros. Au sein des 14 000 coopératives sociales, on dénombre 380 000 salariés (dont 30 000 sont des travailleurs « défavorisés » en parcours d’insertion professionnelle dans une coopérative de type B) et 44 000 bénévoles.