Coop solidaire des Maisons populaires
Charles Laviolette
Collaboration spéciale, coopérative du journalisme indépendant – Journal Ensemble
Pour qui ne désire pas habiter le centre-ville ou la banlieue, les options ne sont pas légion. S’installer dans un village? Peut-être, mais la crainte de l’isolement ou le manque d’emplois en retiendront plusieurs. Pour créer, en campagne, une offre de logement écologique qui répond aux préoccupations des familles, des retraités et des jeunes travailleurs, des citoyens jettent actuellement les bases de la Coop solidaire des Maisons populaires.
De nos jours, les petites communautés rurales du Québec sont confrontées à une série de difficultés démographiques et socioéconomiques. La généralisation de l’utilisation de la voiture, le vieillissement de la population et la propension des jeunes à quitter leur village pour aller étudier ou travailler en ville ont vidé plusieurs villages québécois de leurs commerces et d’une bonne partie de leur population.
Si plusieurs ne peuvent que constater un certain déclin, d’autres, comme Fernand Stuart, s’appliquent à trouver des solutions pour restructurer et redynamiser durablement nos campagnes. Depuis cinq ans, monsieur Stuart et son équipe des Maisons populaires travaillent à développer une autre avenue authentique pour loger des gens de tous âges et de tous horizons qui souhaitent s’installer en milieu rural.
Un « éco-cohabitat »
Actuellement en formation, la coopérative vise à établir, un peu partout au Québec, dans de petites communautés de moins de 2 000 habitants, des ateliers où des maisons seront préfabriquées selon un procédé écologique et avec des matériaux sains. Selon monsieur Stuart, la formule coopérative s’est rapidement imposée « dans le but d’avoir un contrôle sur la qualité et la transparence ». On a donc ici affaire à un « éco-cohabitat », c’est-à-dire un milieu de vie écologique qui comprend des espaces gérés collectivement.
Le projet pourra répondre de façon cohérente à plusieurs difficultés que vivent les villages québécois. Le marché du travail, par exemple, sera dynamisé localement grâce à ces petites manufactures qui auront besoin de plusieurs types d’employés. On pourra également, grâce à un ingénieux système de troc coopératif, échanger du temps en tant qu’employé d’un atelier contre une réduction sur le prix d’une maison.
Recréer le village
Ces entreprises spécialisées dans la fabrication de maisons seront de petite taille, à l’échelle humaine. Des « ateliers ruraux », selon la formule de Fernand Stuart, dans lesquels un savoir local sera déve- loppé. La coopérative a également l’intention de favoriser l’implantation de travailleurs autonomes dans la localité.
Une autre problématique à laquelle la coopérative veut répondre, c’est cette sorte d’éclatement social qui a fait du village québécois, non pas une communauté unie et unique, mais un chapelet de cellules sociales vivant plus ou moins en vase clos. Les Maisons populaires veulent recréer une structure de vie commune autour d’un projet. « Il faut recréer ce qu’était un village anciennement », explique monsieur Stuart.
Les jeunes, les travailleurs et les familles trouveront un milieu de vie dynamique et adapté à leurs besoins. Aussi, en établissant leurs « éco- cohabitats » près des noyaux villageois et des services et en ayant une préoccupation pour les besoins des personnes handicapées lors de la conception des habitations, les Maisons populaires veulent permettre aux citoyens plus âgés de rester dans leur village le plus longtemps possible. « Nos maisons sont faites pour y naître, y vivre et y mourir », affirme Fernand Stuart.
L’écologie n’est pas un luxe
Une des particularités de la démarche de la Coop solidaire des Maisons populaires, c’est la volonté d’offrir ses habitations écologiques à un prix abordable. Selon monsieur Stuart, les maisons seront accessibles à un prix variant de 50 000 $ à 125 000 $. Elles seront de taille raisonnable sur des terrains privés de petite superficie, mais avec un accès à des zones communes gérées par les citoyens.
Alliant la simplicité, l’esprit pratique et une préoccupation écologique, ces aires collectives pourront, selon Fernand Stuart, donner naissance à des cuisines collectives, des projets d’agriculture biologique et des installations pour des animaux de ferme, selon le bon vouloir des résidents. On voit la pertinence du projet lorsqu’on constate à quel point le prix des habitations peut être un facteur d’exclusion dans ce type de projet. Citons, par exemple, la Cité Verte, en Haute-Ville de Québec, qui offre ses plus modiques condominiums à un prix de base de 229 000 $.
Dynamiser la vie communautaire et économique
Du point de vue de l’organisation du territoire, les projets à naître permettront de consolider la zone urbaine des villages en la densifiant. On espère que cette mesure, en favorisant l’utilisation efficace de l’espace, dynamisera la vie communautaire et économique. Pour ce qui est de l’aspect financier, la création d’un fonds de capital communautaire devrait permettre aux résidents à faible revenu de financer plus aisément l’achat de leur propriété. Ce fonds pourrait aussi être utilisé comme levier financier dans le cadre de divers projets.
Des projets d’implantation de ces « éco-cohabitats » progressent dans plusieurs municipalités. On peut nommer La Minerve, Ashton-Jonction, Rawdon et Amherst, qui ont des projets à différents stades d’avancement. Si le premier atelier rural doit ouvrir ses portes au printemps à Amherst, un prototype de maison écologique préfabriquée sera prêt dès cet automne. La coopérative a comme but d’ouvrir des ateliers dans toutes les régions du Québec.