Maisons familiales rurales
Koralie Boyer
Le décrochage scolaire est un enjeu dont on entend beaucoup parler de nos jours. Pourquoi les jeunes abandonnent-ils leurs cours? Le système scolaire est-il réellement adapté à la réalité de la jeunesse actuelle? Les fondateurs des Maisons familiales rurales se sont posé la question et offrent maintenant un type de coopérative qui se veut une solution alternative en éducation.
Qu’est-ce qu’une Maison familiale rurale?
Une Maison familiale rurale (MFR) est un organisme qui offre, en collaboration avec les commissions scolaires québécoises, un milieu de vie ainsi que des cours variés à une clientèle adolescente. Contrairement à l’école traditionnelle, les élèves habitent l’endroit où sont offerts leurs cours, ce qui crée une ambiance différente et plus conviviale. La formation offerte est aussi différente et plus dynamique. « Il y a consolidation entre le diplôme d’études secondaires (DES) et le diplôme d’études professionnelles (DEP) qui se fait en trois ans, soit à partir de la troisième année du secondaire, pour compléter un DEP », explique Gabrielle Bourgault Brunelle, agente en recherche et développement à la Fédération québécoise des coopératives de Maisons familiales rurales (FQCMFR).
L’enseignement est aussi personnalisé, avec la présence de maîtres de stage. « Ce sont des représentants d’entreprises qui, pendant une période dite de stage, accompagnent les élèves et les accueillent dans leur milieu de travail », mentionne madame Bourgault-Brunelle. Elle cite, à titre d’exemple, le programme d’abattage manuel et d’épandage forestier, pour lequel l’entreprise offre une formation en alternance de deux semaines, et ce, jusqu’à la fin de la formation. « Il y aura deux semaines où l’élève apprendra, en classe, le métier d’abatteur manuel et deux autres semaines qui se feront en entreprise, donc sur une ferme ou dans toute autre forme d’entreprise, où il effectuera un stage », précise-t-elle.
Les programmes offerts varient selon la région et ne sont pas nécessairement tous axés sur l’agriculture : assistance aux personnes à domicile, comptabilité, élevage bovin, foresterie, secrétariat, et même restauration! « Les choix des programmes se font en fonction des besoins de main-d’œuvre du milieu, en concertation avec la commission scolaire, qui est un partenaire important pour les MFR, et les entreprises qui offrent des stages aux jeunes », déclare madame Bourgault-Brunelle. Notons quand même la venue d’un nouveau programme de conduite de machinerie lourde à la MFR de Maskinongé.
Le concept de Maison familiale rurale est né à Lauzon, en France, en 1937. L’idée s’est par la suite propagée au monde entier et a fait escale chez nous. « Au Québec, la première MFR a vu le jour en 1999, dans la municipalité de Saint-Romain. C’est une Maison familiale rurale qui fonctionne très bien et qui compte aujourd’hui 90 élèves », raconte l’agente en recherche et en développement. On retrouve aussi des MFR dans la région de Maskinongé et surtout dans l’Est-du-Québec. En 2010, les Maisons familiales rurales se sont regroupées pour former la FQCMFR. « Elles se sont regroupées pour se donner une structure, un porte-parole officiel ainsi que pour promouvoir et assurer le développement des MFR », déclare madame Bourgault-Brunelle.
Le concept, bien que relativement nouveau au Québec, a déjà entraîné des effets positifs chez les jeunes, selon madame Bourgault-Brunelle. « Les témoignages que nous recevons sont très positifs », dit-elle. « Les jeunes qui participent aux MFR, souvent, ce sont des jeunes qui ne sont pas nécessairement de mauvais élèves, mais qui cadrent moins avec le système offert actuellement par le ministère. Ils s’adaptent moins bien à la formule proposée. Les programmes offerts dans les MFR sont souvent des programmes manuels, et on sait que quand on est manuel, c’est un peu plus difficile de rester sur les bancs d’école », commente Gabrielle Bourgault-Brunelle.
« Les élèves apprécient beaucoup le fait de pouvoir pratiquer le métier qu’ils apprennent en même temps qu’ils font leur formation. » Selon les statistiques fournies par l’agente de recherche et développement de la Fédération, entre 2001 et 2007, 85 % des jeunes suivant un programme d’une MFR ont complété un DEP, 65 % d’entre eux ont obtenu leur diplôme d’études secondaires, et 39 % ont décidé de poursuivre leur formation au collégial. C’est, selon madame Bourgault-Brunelle, un signe très encourageant qui démontre que les Maisons familiales rurales sont efficaces.
Quelques témoignages
Voici les témoignages d’une ancienne élève et de la mère d’un ancien élève de MFR, visiblement ravis, fournis par madame Bourgault-Brunelle. Ces témoignages motiveront peut-être d’autres jeunes à tenter l’expérience des MFR!
Le fait de vivre deux semaines par mois avec 30 autres jeunes du même âge nous permet d’enfin nous épanouir en tant qu’êtres humains. Elle nous permet d’augmenter notre confiance en nous et de mieux nous connaître. La MFR nous prépare réellement à notre vie d’adulte.
Elle nous apprend l’importance du travail d’équipe, de la communication, du respect des autres et de l’autodiscipline. Elle nous rend plus responsables et autonomes et nous fait réaliser à quel point nous avons du potentiel ainsi qu’une volonté que nous ne pouvions pas imaginer.
Grâce à la MFR, j’ai un avenir magnifique devant moi. Je lui dois énormément. Deux ans sont passés depuis que j’ai terminé et je donnerais n’importe quoi pour y retourner. L’expérience MFR est l’expérience d’une VIE. Elle m’a offert un avenir, une deuxième famille sur qui je pourrai toujours compter.
La MFR m’a grandement aidée à m’épanouir et à devenir la jeune femme de 20 ans que je suis aujourd’hui. Je dois tellement à un projet d’études qui a changé ma vie.
Stéphanie Cake, Saint-Wenceslas, diplômée en production laitière de la Maison familiale rurale de la MRC de Maskinongé.
En tant que parent, je remercie la MFR pour son programme extraordinaire qui a fait de mon fils un diplômé. Aujourd’hui, je regarde mon fils et il laisse sortir le soleil en lui. Avec la MFR, mon fils a retrouvé le goût de poursuivre son idéal, c’est-à-dire de sortir avec son diplôme et son DEP. Merci à la MFR, l’école qui a sauvé mon fils du décrochage.
Lyne Marcouiller, mère comblée et heureuse, Maskinongé